L’écologie, autre nom de l’économie ?

Friedrich Engels avait prévenu : « Ne nous flattons pas trop de nos victoires sur la nature. Elle se venge sur nous de chacune d’elles ». La crise du Coronavirus, que son origine soit due à une chauve-souris ou à un pangolin, illustre hélas parfaitement ces propos et les conséquences d’une biodiversité maltraitée par une déforestation massive.

Mais au-delà des conséquences humaines et économiques dramatiques de la pandémie, cette dernière va sans doute contribuer à une meilleure prise de conscience de l’urgence écologique. A la faveur du confinement de milliards d’êtres humains, la nature a en effet un peu partout repris ses droits : on a vu revenir des dauphins à Venise ou en Sardaigne, des troupeaux de cerfs envahir les rues du Japon ou encore le ciel des mégapoles chinoises retrouver sa clarté.

L’arrêt de l’activité humaine a entrainé la plus forte diminution annuelle des émissions de gaz à effet de serre jamais enregistrée. Cela fait dire à certains observateurs qu’un simple virus aura réussi là où tous les sommets internationaux ont échoué. Bien sûr, il faudrait une baisse analogue des émissions pendant des années pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 % à l’horizon 2050 comme le préconise le GIEC, mais une chose est sûre, la crise sanitaire mondiale a permis de mieux comprendre les effets de nos systèmes économiques et de nos modes de consommation sur le climat, la biodiversité ou la qualité de l’air.

Saurons-nous pour autant en tirer les leçons et adapter sinon changer nos modes de vie pour le futur de notre planète ?

Même si l’écologie est désormais en tête des préoccupations des Français, jusqu’ici les alertes au changement climatique ont été trop peu entendues en dépit de l’activisme des jeunes du collectif Fridays for Future ou de la progression enregistrée par les partis verts lors des dernières élections. Pourtant tous les indicateurs sont au rouge : les forêts brûlent en Australie, en Californie ou au Brésil, des pays entiers et des îles sont menacés de disparaître sous les eaux, la sécheresse entraîne des flux migratoires incessants, des espèces sont menacées ou disparaissent et les épisodes de canicule se multiplient. La crise climatique n’est pas hypothétique mais bien réelle et ses conséquences peuvent être catastrophiques si rien n’est entrepris.

La pandémie nous invite à réfléchir sur le monde d’après, mais si la prise de conscience est là, les actes suivront-ils ? « La crise du Covid a été un accélérateur. Les gens ont compris que nous sommes vulnérables et que, si nous ne faisons rien, après la crise sanitaire, nous aurons la crise écologique » a déclaré Barbara Pompili lors de son arrivée au ministère de la Transition écologique. Pour elle, « c’est le bon moment pour gagner la bataille écologique ». Oui, mais comment ? Et quel rôle pour l’économie et pour les entreprises ? Elles sont de plus en plus nombreuses à s’engager et à investir pour décarboner leur production à l’image des signataires du Business Climate Pledge en 2019.

Revenir au business as usual ne semble pas être une option. La mondialisation, résultat de quatre décennies d’expansion sans limite de l’économie de marché, a montré ses limites. Pour autant prôner la décroissance, comme certains n’hésitent pas à le faire, serait la garantie d’une récession, d’un retour en arrière et d’une aggravation de la pauvreté. Entre ces deux extrêmes quelle peut donc être la voie médiane ?

L’enjeu aujourd’hui est de relancer l’économie tout en opérant une reconstruction écologique. De redémarrer l’économie autrement, de façon plus durable et plus responsable. « La transition écologique doit être l’horizon de notre économie », a déclaré Bruno Le Maire pour qui « avoir l’économie la plus décarbonée en Europe est une fierté nationale ».

« L’écologie ne doit pas s’opposer à l’économie et à la croissance. Bien au contraire », avertit l’économiste Marc Touati, et de très nombreuses entreprises ont d’ores et déjà bien compris la nécessité de favoriser les énergies renouvelables et les activités faiblement polluantes.

Mais comment aujourd’hui aller encore plus loin pour entreprendre sans détruire ? C’est ce que nous diront les intervenants de la table ronde « L’économie au secours de l’écologie, et vice-versa ? »

Nous sommes à la croisée des chemins, l’heure est venue de faire de « l’écolonomie ».